Bébé


Disclaimer : Les personnages ne sont pas ma propriété, j'écris pour m'amuser et je ne touche aucune rémunération hélas :(
Style : drame
Résumé : Jim et Sarah sont mariés et heureux mais…la vie n'est pas toujours rose
Auteur : Scilia

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Je m'appelle Sarah, Sarah Ellison. Je suis mariée depuis trois ans avec un homme fantastique dans tous les sens du terme. Je ne sais pas par où commencer… Ce que j'ai à dire n'est pas facile… Quelqu'un m'a dit qu'écrire m'aiderait, pour l'instant cela me paralyse plutôt.

Notre vie était parfaite ou presque, jusqu'à il y a une semaine. Nous sommes inspecteurs tous les deux. Jim à la criminelle et moi aux mineurs. Notre voisin est le meilleur ami de mon mari, Blair, c'est devenu le mien aussi avec le temps. Mais je m'égare, si j'écris, c'est parce que j'ai perdu quelque chose de précieux.

Il y a deux mois je me suis aperçu que j'étais enceinte. Nous attendions cela depuis longtemps, Jim en a sauté au plafond et moi j'ai pleuré comme une madeleine pendant une heure. Cela nous obligeait à revoir notre style de vie mais ce n'était pas un problème pour nous, nous voulions un enfant depuis tellement longtemps. Je n'ai pas eu de signes significatifs de cette grossesse, une ou deux nausées mais rien d'extraordinaire comme le disait mes amies. Le temps passait et nous parlions souvent de ce bébé qui allait être la preuve vivante de notre amour. Jim se demandait s'il aurait ses dons, Blair n'avait pas de réponse. Nous avons commencé à faire le tour des magasins de jouets, de lits, d'équipements pour enfants. Enfin surtout moi, je me sentais tellement forte, heureuse avec cette petite vie qui grandissait au fond de moi. Ma meilleure amie Jessica m'accompagnait souvent, elle commençait tout juste à sortir avec Blair. Non, en fait en y réfléchissant, elle habitait avec lui dans l'appartement voisin. Nous avons creusé une porte de communication entre nos deux appartements, histoire de se voir plus facilement. Elle venait de ramener ses affaires. J'ai passé plusieurs soirées avec elle à rendre l'appartement "décent ", parce qu'on ne peut pas dire que Blair soit le roi du ménage. Jessy connaît tout de moi, ou presque, elle savait combien j'espérais cet enfant. Je ne pourrais jamais la remercier pour tout ce qu'elle a fait quand j'ai su que…

Je suis allée à la première visite médicale, heureuse comme toutes les futures mamans je pense. Jim s'était débrouillé pour m'accompagner, il prenait son rôle de papa très à cœur. Le médecin m'a confirmé que j'étais enceinte et m'a fait une échographie. Jim et moi n'avons rien vu de spécial. Il faut dire que pour des yeux non-entrainés, l'écran n'est qu'un dégradé de couleur. Le médecin m'a dit de revenir dans une semaine, sans dire pourquoi. J'aurais dû me douter qu'il y avait un problème mais je suis repartie en pensant que tout allait bien. Pour le deuxième rendez-vous, Jim n'a pas pu m'accompagner. J'allais le chercher dans la salle de la criminelle quand il m'a appelé pour me prévenir. J'étais déçue mais notre job est contraignant, alors je lui ai dit que ce n'était pas grave, que je le retrouverai le soir au loft. Jessica savait que j'avais ce rendez-vous et a vu que je faisais demi-tour. Elle a proposé de m'accompagner. J'ai accepté, je n'avais pas envie d'y aller seule. Simon l'a laissée partir sans problème. Simon Banks est le capitaine de la criminelle et un ami, j'ai travaillé avec lui quelques années avant de demander mon transfert.

Nous avons attendu un peu. Jessica m'a parlée de Blair, je crois. Je ne me souviens plus très bien. Quelque chose me disait que ce rendez-vous n'était pas normal depuis que j'avais passé la porte du cabinet. Enfin, le docteur m'a reçue. Il m'a posé quelques questions, n'a pas dit si les réponses le satisfaisaient et m'a demandé de me déshabiller pour faire une seconde échographie. Il a regardé son écran pendant plusieurs minutes. Je ne voyais pas son visage, il me tournait le dos. Il n'a rien dit quand il a arrêté la machine. J'étais entrain de me rhabiller quand il a prononcé une phrase. Je ne l'ai pas compris sur le coup, il a répété : " Je suis désolé mais il n'y a pas de bébé ". Le monde s'est arrêté de tourner un instant pour moi. J'ai refusé de le croire, j'avais mal entendu mais un regard à Jess et j'ai su. J'ai su que j'étais vide, que tous mes rêves de bonheur venaient de s'envoler. J'ai résisté, me suis promis de ne pas craquer devant ce type ou devant Jess, je n'ai pas réussi. J'ai fini de m'habiller et suis venue m'asseoir sur ma chaise où dix minutes plus tôt je me disais que le monde était merveilleux. Il m'a parlé d'une petite opération, qu'il fallait le faire sans délai. J'avais envie de lui crier qu'on pouvait bien me tuer là, tout de suite, que je m'en foutais. Ma vie n'avait plus de sens sans cet enfant en moi. Je me suis contentée de hocher la tête, il m'a donné un rendez-vous pour deux jours plus tard. Je suis allée à l'accueil régler ce médecin qui venait de détruire ma vie. L'infirmière n'a rien dit même si elle a vu que mon chèque était plein de larmes. Jess était près de moi, j'avais au moins quelqu'un à qui me raccrocher.

Et puis, je l'ai senti. Ca doit vous paraître étrange mais je sais quand Jim est là. Nous travaillons dans le même immeuble, lui au 5e et moi au 3e, et bien je sais quand il arrive. J'ai déjà fait le test de l'appeler, quand je le sentais arriver. Il rigolait parce qu'il disait qu'il ne pourrait jamais me surprendre. Il avait réussi à venir finalement, en retard mais il était là. Blair était avec lui. Jim a mis sa main sur mon épaule. Je n'arrivais pas à me retourner, à lui dire que j'étais nulle, que j'avais perdu notre enfant. C'est comme cela que je l'ai ressenti et que je le ressens toujours. C'est de ma faute même si je ne sais pas pourquoi. Il m'a appelé doucement, il ne comprenait pas. Je crois qu'il a regardé Jessy mais elle ne pouvait rien lui dire non plus. Finalement, je me suis tournée. Il fallait que je lui dise même s'il ne pouvait pas apaiser ma douleur. Il avait le droit de savoir. Quand il m'a vu en larmes, il n'a pas cherché à savoir ce qui se passait. Il m'a prise contre lui, son étreinte était rassurante mais je me suis dégagée. Je n'avais pas le droit a cette chaleur, pas le droit à sa pitié. Il allait me détester quand il saurait. Vous allez trouver ça étrange mais… Je me suis enfuie sous le regard ahuri de mon mari. Je suis sortie de l'hôpital et j'ai couru, je voulais laisser tout cela derrière moi. Je voulais… Disparaître. Je me suis retrouvée dans un terrain vague. J'ai senti mon arme dans mon dos, je l'ai prise. Le contact froid sur ma paume, le bruit du chien quand je l'ai armé… Il est arrivé. Ses sens l'avait aidé à me retrouver. Difficile de se cacher quelque part, quand votre mari est une sentinelle. Il ne savait toujours pas. Il avait peur, je le voyais dans ses yeux. Je n'ai pas eu le courage, ma main est retombée moi avec. Je me suis retrouvée à genoux, et je lui ai dit entre deux sanglots. Je lui ai dit que… Qu'il n'allait plus être père. Je n'ai pas vu son visage. J'ai senti ses bras qui me soulevaient, il m'a serrée très fort contre lui. Il disait que ce n'était pas grave, qu'il m'aimait, qu'il y aurait d'autres bébés. Je ne l'entendais pas, j'étais ailleurs. Je l'ai senti me mettre dans la voiture, me ramener chez nous. Je n'avais plus de force. Il m'a porté jusqu'à notre chambre et s'est allongé près de moi. Je ne voulais pas qu'il me touche mais il m'a quand même pris dans ses bras. Je ne sais pas combien de temps nous sommes restés comme ça. Le téléphone a sonné deux fois mais nous n'avons pas bougé. Je n'ai pas fermé l'œil de la nuit, Jim s'est assoupi au petit matin. J'en ai profité pour me lever doucement et aller dans la salle de bain. Je me suis regardée dans le miroir, moi, celle qui avait été incapable de construire quelque chose avec ce corps. J'avais envie de prendre un couteau et… Mais une petite voix m'a dit que cela ne servirait à rien. Je l'ai écouté. J'ai fait du café, préparé le petit déjeuner comme si c'était une journée ordinaire. Je n'ai rien pu avaler. Jim s'est levé quand il m'a entendu, il avait peur que je n'ai de nouveau envie de le quitter.

Les deux jours ont passé. Je ne suis pas allée travailler, Jim non plus, bien qu'il ne puisse rien pour moi. Il m'a accompagné le jour de "l'opération ". Il m'a redit qu'il m'aimait avant qu'on ne m'emmène au bloc. J'ai attendu un moment dans le couloir, il faisait froid, une infirmière m'a fait une perfusion, m'a sourit et moi tout ce que je pensais c'est : " Pourquoi moi ? Qu'ai je donc fait pour passer par-là ? ". Tout s'est passé sans problème, si l'on peut dire. J'ai repris le dessus grâce à Jim, Blair et Jess. Pour les autres… Je ne savais pas comment expliquer que je n'étais plus enceinte, qu'il n'y aurait pas de petit Ellison gambadant dans le central à la recherche de ses parents. Je crois que c'est Jim qui leur a dit, mais personne ne m'en a parlé. Je préférais, j'avais trop honte. J'ai vu leur regard triste mais je n'avais pas besoin de leur pitié.

Jess et Blair attendent leur premier enfant. Ca me fait mal mais je suis heureuse pour eux. Je ne sais pas si j'arriverais un jour à surmonter tout ça, bien que cela fasse six mois. Je sais depuis hier que nous avons une nouvelle chance. Je n'en ai parlé à personne, j'ai peur. Tellement peur que l'on me l'enlève aussi. Tellement peur d'espérer pour être de nouveau déçue, tellement peur que si je le perds Jim me quitte, même si je sais au fond de moi que cela n'arrivera pas. Je lui dirais peut être ce soir. J'ai envie de voir cette lueur s'allumer au fond de ses yeux mais en même temps si … Mon médecin a eu raison, écrire me soulage un peu même si je sais que personne ne lira jamais ceci et que, malgré ce nouveau bébé, je n'oublierais jamais celui qui a failli être.


Sarah MacLane Ellison, 14 décembre 2001