The Sentinel

Titre : 89

Auteuse : Laurie

Genre : gen, smarm

Synopsis : C'est le premier jour de Blair en tant que flic. Jim et lui enquêtent sur un meurtre, et protègent une adolescente, Mathilda, treize ans, surnommée Matt, qui est très perspicace et découvre rapidement la vérité concernant la relation entre Jim et Blair.

Disclaimer : Les personnages qui sont apparus dans la série ne m'appartiennent pas, mais appartiennent à Pet Fly et Paramount. Je ne gagne pas d'argent en écrivant cette fanfiction. C'est juste pour le plaisir des fans, et le mien aussi !

Feedbacks : Merci de me dire ce que vous pensez de cette histoire, qui est ma première fanfic. Laurence1987@aol.com


CINQ CHAPITRES

1. Premier jour

2. Trafic d'armes

3. Sentinelle

4. Huit heure et demi

5. Epilogue


PARTIE 1 : PREMIER JOUR

C'était un mercredi de Février. Les derniers jours avaient été orageux ; ce jour-là le temps était meilleur, malgré un ciel toujours très gris. Le vent, lui, était resté fort et froid, si bien que les rues de Cascade étaient désertes, à part, ici et là, quelques personnes isolées qui accéléraient leur pas, pour retrouver au plus vite le confort et la chaleur de leurs foyers.

Au Central, l'atmosphère était bien plus détendue et heureuse. La journée avait été calme. Un homme était assis à son bureau, bavardant et plaisantant avec un autre homme, plus jeune. Le premier était Jim Ellison, l'autre, Blair Sandburg.

C'était le premier jour de Blair en tant que policier. Il venait de terminer son passage à l'Académie de Police. Il n'aurait jamais imaginé qu'un jour, il serait policier, mais depuis qu'il avait annoncé à la télévision que sa thèse sur les Sentinelles était une fraude, il avait réalisé qu'il était enfin arrivé là où il était supposé être. Il avait même accepté de se faire couper les cheveux, ce qui était un vrai sacrifice pour lui, mais tout cela en valait vraiment la peine.

Il était environ quatre heure de l'après-midi quand le téléphone sonna. Jim ne décrocha qu'après cinq sonneries. En fait, il savait déjà qui appelait et il savait que la journée allait en être gâché.

"Ellison."

"Jim, c'est Simon, annonça la voix. Je veux que Sandburg et toi veniez immédiatement au Parking Souterrain Lincoln."

Jim n'eut pas le temps de répondre ; Simon avait raccroché.

"C'est Banks ?" demanda Blair

"Oui, répondit Jim en se levant. Prends ta veste et ton écharpe. On doit aller au Parking Souterrain Lincoln. "

"Pour quoi ?"

"Aucune idée. Mais certainement pas pour pêcher."

Il arrivèrent sur place en une dizaine de minutes. Leur Capitaine, Simon Banks, les attendaient à l'entrée du parking. En le voyant, Jim comprit qu'il n'était pas d'une humeur très gaie.

"Alors, demanda Jim. Que s'est-il passé ?

- Une femme a été tuée il y a environ une demi-heure de cela.

- Comment ?

- Par balle. Un chauffeur de taxi a trouvé le corps dans le parking, à côté de la voiture de la victime. Il a dit qu'il avait vu un homme sortir en courant mais il n'a pas pu le poursuivre à cause d'un genou douloureux. Il n'a pas pu décrire l'homme, mais il est persuadé que c'est l'assassin."

Simon les conduisit au deuxième sous-sol, où se trouvaient la voiture et le corps. Le coffre de la voiture était encore ouvert, et les deux détectives purent voir un sac à dos, deux sacs de voyage verts parfaitement identiques, et quelques sacs en plastique de supermarché contenant les denrées qu'apparemment la victime venait d'acheter. Deux des sacs se trouvaient par terre, juste devant le coffre, déversant leurs contenus sur le sol.

"On a trouvé sa carte d'identité dans la voiture, expliqua Simon. Elle s'appelait Margaret Stevens. J'ai demandé des renseignements aux policiers présentes, mais ils n'ont encore rien trouvé. Le legiste...

- Eh ! s'écria Jim. Viens avec moi, Grand Chef !

- Qu'est-ce qu'il y a ?

- Il y a quelqu'un là-bas."

Jim et son partenaire se dirigèrent vers les containers poubelle. En effet, un enfant se cachait là. Il semblait jeune, on ne lui aurait pas donné plus de douze ans. Ses cheveux courts, légèrement hérissés et ébourriffés, étaient blonds. Blair regarda ses mains égratignées et son sourcil droit qui saignait, mais ce n'était pas ce qui le marqua le plus. Blair pouvait voir dans les yeux de l'enfant qu'il essayait de cacher sa peur et de retenir ses larmes. A l'instar de son partenaire, il comprit immédiatement que le garçon pouvait avoir été témoin du meurtre. Ils parvinrent à le convaincre de les accompagner, au moins de laisser un des ambulanciers désinfecter la plaie de son sourcil. L'enfant refusa tout d'abord en secouant la tête lentement de droite à gauche, puis finit par accepter.

L'enfant était assis dans l'ambulance, touchant le pansement sur son sourcil, quand Jim arriva. Il avait mis son capitaine au courant de la présence de l'enfant et voulait l'interroger sur sa présence dans le parking.

"Alors, commença-t-il. Comment ça va, boy ?

- Je suis une fille, répondit simplement l'enfant.

- Excuse-moi. Tu connais cette femme ?

- C'est ma mère.... C'était. "

La voix de l'adolescente était exempte du moindre sentiment. et donnait l'impression qu'elle provenait d'un robot ou d'une voix synthétique pré-enregistrée. Mais en même temps, Jim savait que ce n'était pas réel. Il se souvint de sa propre enfance, quand sa mère était partie, alors qu'il était encore très jeune. Il savait que ce n'était pas exactement pareil dans ce cas, mais quand on est un enfant, on ne ressent pas les choses comme un adulte le ferait, on n'interprète pas les choses de la même façon, et les deux pertes font tout aussi mal. Il se souvint aussi comment il essayait de refouler et de cacher ce qu'il ressentait, pour que son père ne voie pas qu'il n'était pas encore un homme mais juste un enfant, avec les faiblesses de chaque enfant.

"Je suis désolé.

- Ouais...

- As-tu vu comment c'est arrivé ?

- Non, je n'ai rien vu.

- Tu es sûre.

- Oui."

La voix était convaincante mais vide. A peine l'enfant avait-elle répondu que Blair arriva.

"Jim, dit-il, il vous porter le corps à la morgue. Simon veut que tu le voies avant, au cas où tu pourrais trouver quelque chose.

- Et toi ?

- Je reste avec toi. Ils vont emmener l'enfant au Central pour qu'on puisse l'interroger à notre retour."

L'adolescente était assise sur une chaise depuis environ vingt minutes, et le flic qui était avec elle était très grossier et méchant. Il lui posa plusieurs questions. Elle avait vu suffisamment de séries TV pour savoir ce qu'elle devait dire et faire. Au moins, c'était ce qu'elle pensait.

"Résumons." Le flic prit ses notes et les relut."Tu t'appelles Mathilda Stevens et tu as treize ans. La femme qui a été assassinée est ta mère mais tu n'as rien vu. Tu ne sais pas ce qui s'est passé. Tu es arrivé après le meurtre et tu t'es cachée pour qu'on ne te voie pas ?"

Mathilda demeura silencieuse. Elle ne lui faisait pas confiance. Elle avait pris la décision de ne prononcer aucun mot tant que ce type serait dans la même pièce qu'elle. Quelqu'un ouvrit la porte. Mathilda put voir entrer les deux détectives qui l'avaient trouvée. Le plus grand dit quelque chose au flic qui la surveillait, l'horrible type répondit qu'il était inutile de l'interroger, puis quitta la pièce.

Revirement dans le jeu.

"Ces deux hommes vont-ils être mes adversaires ou mes alliés ?" se demanda-t-elle. Elle devait répondre à cette question très vite. L'assassin devait bien sûr être puni, mais elle voulait contrôler comment il le serait, parce que cette fois, ce qui était mis en jeu était son avenir, et sa vie. Elle devait absolument mettre en pratique tout ce qu'elle avait appris, et ne pouvait pas faire une seule erreur.

Ellison s'assit, et lut les notes. L'autre homme était toujours debout. Puis, Ellison parla, d'une voix compatissante :

"Ok. Mathilda, je sais que ce que tu es en train de vivre est très dur. Et je sais que tu préfèrerais être ailleurs que dans cette pièce. Mais je dois savoir. Dis-nous la vérité.

- Je ne peux pas."

Mathilda ne savait pas pourquoi elle avait dit cela, et aussitôt que les mots avaient quitté sa bouche, elle le regretta.

"Pourquoi ?" demanda Jim

"Je ne peux pas parce que je pourrais me faire tuer."

Une nouvelle fois, elle n'avait pas pu retenir ses mots. Mais maintenant, ils étaient trop importants pour retourner en arrière. Elle décida de ne pas les laisser parler avant d'avoir ajouté un petit quelque chose qui pourrai retarder sa réponse.

"Et, s'il-vous-plaît, ne m'appellez pas Mathilda. Tout le monde dit Matt."

Les deux hommes sourièrent mais ne répondirent pas. Matt continua :

"Où es-ce que je vais aller maintenant ?

- Tu n'as pas de la famille qu'on pourrait joindre ? demanda Jim. Des grands-parents, une tante, ton père ?"

Quand elle entendit le mot père, l'adolescente ne put retenir un tremblement. Elle répondit :

"Ma mère était ma seule famille. Je n'ai plus mes grands-parents et elle était fille unique.

- Et ton père ?

- Comme je l'ai dit à votre collègue, je ne sais pas où il est."

Jim remarqua qu'elle venait d'utiliser la même voix que dans l'ambulance ; c'était sans aucun doute là que se trouvait la vérité. Il voulait approfondir ce point, mais le regard que Blair lui lança lui fit comprendre que ce n'était pas une bonne idée. Il savait que s'il voulait que Matt dise la vérité, il devait gagner sa confiance.

"Je vais aller à la D.D.A.S. ou un orphelinat alors ?

- Probablement, répondit Blair.

- Fantastique ! s'exclama Matt avec ironie. Je vais vivre avec des enfants qui vont se moquer de moi tous les jours de l'aube au crépuscule ; je ne vais pas être autorisée à agir comme j'en ai envie et je ne vais pas aller à l'Université. Vous voulez vraiment que je me suicide ?

- Que veux-tu étudier à l'Université ?" interrogea Blair.

Bien sûr, il savait très bien que Jim n'approuverait pas qu'il sorte du sujet, mais l'enfant lui tendait une perche qu'il se devait de prendre.

"L'anthropologie." répondit-elle

"Sandburg, tu viens de te faire une nouvelle amie." Jim dit à son partenaire.

Le nom était familier à Matt ; elle se souvint l'avoir déjà entendu à la télé :

"Sandburg ? Blair Sandburg ? interrogea-t-elle. Vous n'êtes pas ce type qui a écrit une thèse sur ce truc... les Sentinelles...qui était une fraude ?

- Eh bien, à vrai dire, si, c'est bien moi."

Blair se sentait un peu embarassé. Jim le remarqua et sourit. Mais il était temps de revenir à la raison principale de la présence de Mathilda Stevens dans cette pièce.

"Matt, dit-il. Tu sais, on est des policiers et notre travail est de te protéger. Si dire ce que tu sais est dangereux pour toi, tu dois nous le dire et on te gardera en sécurité.

- Eh bien, je..." La voix de Matt tremblait un peu. Elle ne pouvait pas retarder ce moment à nouveau. Mais maintenant, elle était convaincue que les deux détectives n'étaient pas comme le premier homme qui l'avait interrogée."Je ne sais vraiment pas qui est le tueur et je n'ai pas vu comment ça s'est passé. Mais j'étais bien avec ma mère quand c'est arrivé.

- Peux-tu être plus précise ? demanda Jim.

- Il ne l'a pas... tuée en premier. Avant, il m'a frappé à la tête avec quelque chose.

- C'est pour ça que ton sourcil saignait."

C'était la voix de Blair Sandburg. Matt se demandait encore pourquoi il était devenu flic après la conférence de presse. Mais elle aurait le temps d'y réfléchir plus tard.

"Oui, répondit-elle à l'ex-anthropologue.

- Donc tu as vu l'homme ?

- Non.

- Ton sourcil saignait, lui rappela Jim. Donc l'assassin t'a frappée au visage.

- Non, il venait de ma droite. Et ça a été tellement rapide ! Je n'ai rien pu voir.

- Et après ?

- Après ? J'étais au sol, à moitié inconsciente. J'ai entendu ma mère crier. Comme....Comme dans un film. Et un flingue. Je me souviens du moindre bruit que ce flingue a fait. Le clic de la détente, et le pan du coup de feu. J'ai entendu ma mère tomber. Et ensuite, l'homme est parti.

- Attends une minute. Comment sais-tu que c'était un homme si tu n'as rien vu.

- Quoi ? Un homme.... C'est un être humain."

Simon ouvrit la porte.

"Ellison, Sandburg, vous avez terminé ? La femme de la D.D.A.S. est ici.

- On a presque fini, Simon.

- La gosse a l'air fatiguée, Jim. Elle reviendra demain."

En effet, Matt ne put se retenir de bailler. Elle se leva, prit son blouson et dit aux deux détectives :

"Vous voyez ? Je suis une enfant de la D.D.A.S. maintenant, qui va payer ma tombe ?"

Elle partit avec Banks.

Blair lança un regard interrogateur à son ami :

"Qu'en penses-tu ?

- Je ne sais pas. Je suis presque sûr qu'il y a un rapport avec son père. Tu as vu comme ses mains tremblaient quand j'ai parlé de lui ?"

Trois hommes, assis autour d'une table, jouaient aux cartes.

"Les avez-vous tuées toutes les deux ? demanda l'un d'entre eux, grand, aux cheveux noirs.

- J'ai tué Maggie, Andy, lui répondit un homme plus petit. Une voiture arrivait et je ne voulais pas me faire arrêter.

- Où est Matt ?

- Je ne sais pas. Certainement avec les flics ou à la D.D.A.S.

- Vous êtes sûrs qu'elle ne va rien dire ? demanda le troisième homme.

- Tu sais de qui tu parles ? s'exclama celui qui s'appelait Andy. Matt est ma fille. Elle sait ce que je lui ai appris. Ok ?

- Ok. Ce n'était qu'une question. "

Après un moment de silence, Andy ôta sa cigarette d'entre ses lèvres et annonça, résigné :

"On n'est jamais trop prudents ! Vous irez la tuer demain."

PARTIE 2 : TRAFIC D'ARMES

Jeudi. Jim et Blair se rendirent au Central ; à peine eurent-ils rejoint leur bureau qu'ils entendirent :

"Ellison ! Sandburg ! Dans mon bureau !"

"J'ai reçu les résultats de l'autopsie ce matin." annonça Simon. "On a trouvé une seule balle dans le coeur de Stevens. La voici."

Il tendit à Jim un sac plastique transparent contenant la balle en question. Jim la toucha pendant quelques secondes puis dit :

"C'est étrange ! Je n'arrive pas à la reconnaître. Son toucher est différent.

- Ce n'est pas étrange, Jim." répondit Simon."On n'a jamais vu une telle balle avant aujourd'hui. Mais à ce que je sais, un nouveau traffic d'armes a été mis en place et opère dans le monde entier. Ce peut être une de leurs nouvelles balles.

- Attendez, vous voulez dire que le tueur est peut-être membre de ce traffic ? demanda Blair.

- Ou il y participe, or il est client."suggéra Jim."Mais dans tous les cas, il sait quelque chose.

- Quelque chose d'autres ? demanda Jim en voyant Ellison ouvrir la bouche, comme pour ajouter quelque chose.

- Si le tueur est membre de ce traffic, Margaret Stevens a peut-être été tuée parce qu'elle savait quelque chose.

- C'est une possibilité.

- Quand Matt doit-elle revenir ? demanda Blair. Peut-être en sait-elle plus qu'elle ne le dit.

- La D.D.A.S. doit m'appeller pour me le dire. Au fait, pourquoi a-t-elle parlé de tombe hier ?

- Elle était sous le choc de la mort de sa mère, Simon."

Blair s'apprêtait à sortir acheter quelque chose à manger et Jim lisait le rapport de l'autopsie quand la sonnerie du téléphone retentit. C'était le centre où avait été placée Matt. Jim essaya de rassurer son interlocuteur puis annonça qu'il arrivait tout de suite avant de raccrocher. Blair l'interrogea sur la nature de l'appel mais Jim ne répondit pas, se rendant précipatemment dans le bureau de Simon pour en ressortir à peine quelques secondes plus tard. Il prit sa veste et celui de Blair, qu'il tendit à son propriétaire. Blair répéta sa question quand ils arrivèrent à l'ascenseur, and cette fois, obtint une explication :

"Quelqu'un a essayé de tuer Matt pendant une récréation au centre. Il a tiré depuis une voiture.

- Des blessés ?

- Non. Mais les enfants sont tous effrayés.

- Et Matt ?

- Elle va bien mais le directeur m'a parlé de problèmes d'intégration avec les autres enfants."

Enfin, ils arrivèrent à l'orphelinat. Le directeur attendait à l'entrée avec Matt, qui tenait son sac à dos à la main.
"Je ne peux pas la garder. Je ne veux pas que d'autres enfants soient blessés ou tués. J'espère que vous comprenez.

- Oui. Oui, bien sûr." Jim répondit."Matt, tu vas venir avec nous.

- Au Central de la Police ? interrogea le jeune garçon manqué.

- Oui. Où veux-tu... ?

- Non, Jim." s'interposa Blair."Je ne crois pas que ce soit une bonne idée. S'ils ont trouvé qu'elle était ici, c'est certainement là-bas qu'ils vont la chercher maintenant. Elle n'y sera pas en sécurité.

- Que suggères-tu, Grand Chef ?

- Le loft.

- Le loft ? Tu plaisantes ?

- Personne n'irait la cherchr là-bas, expliqua le jeune homme. L'un de nous restera avec elle pendant que l'autre continue l'enquête, puis on échangera les rôles.

- Laisse-moi demander à Simon." conclua Jim en prenant son téléphone portable.

Jim essayait de convaincre son capitaine. Matt se tourna vers Blair et lui demanda :

"Je n'ai pas le droit de dire ce que je pense de tout cela ?

- Blair accepta et elle poursuivit :

"Si j'ai bien compris, je vais rester enfermé chez vous jusqu'à ce que ce soit fini, c'est ça ?

- Oui. Tu y seras mieux qu'ici.

- On a l'accord de Simon." annonça Jim.

Matt, très peu enthousiaste, soupira avant de monter dans la voiture de Jim.

Matt entra dans le loft la première et posa son sac. Le loft était mieux rangé qu'elle ne l'aurait imaginé, mais ne présentait rien d'exceptionnel, et elle était persuadée que l'ennui la gagnerait après cinq minutes.

"Je déteste être enfermée !

- Tu préfèrerais te faire tuer ?" rétorqua Jim avec une pointe ironie.

Matt le regarda, frappa lemtement des mains en répondant :"Ah ! Ah ! Ah ! Vraiment très drôle !"

Jim sourit, parla à son partenaire puis repartit.

"Est-ce qu'il est toujours comme ça ? demanda Matt.

- Non, il est juste fatigué.

- D'accord, dit Matt, qui tentait de lancer la conversation, depuis combien de temps vous connaissez-vous ?

- Jim et moi ? Environ cinq ans.

- Et vous le supportez depuis tout ce temps ?"

La remarque était une plaisanterie, devina Blair en voyant le sourire que lui lança Matt, et il ne put que lui rendre son sourire.

"Tu veux boire quelque chose ? demanda-t-il depuis la cuisine.

- Une bière, s'il-vous-plait, répondit Matt, d'un ton sérieux.

- Quoi ? - Blair, surpris, lui lança un regard étonné.

- Je plaisante. Un verre d'eau sera parfait."

Jim écoutait la radio au volant de sa voiture. Son téléphone sonna. Simon lui demanda de se rendre au Central au plus vite, il avait du nouveau à propos du traffic d'armes.

"Je vais jeter un coup d'oeil au parking Lincolm et j'arrive.

- Pourquoi veux-tu retourner là-bas ?

- Juste au cas où. Cela ne sera pas long."

Blair revint de la cuisine et donna le verre d'eau à Matt, qui s'assit sur le canapé.

"C'est bizarre !

- Qu'est-ce qui est bizarre ?

- Je n'arrive pas à comprendre comment vous deux pouvez être amis. Vous êtes tellement différents."

Blair sourit et répondit que ce devait être le Destin, pendant que ce serait une réponse suffisante.

"Oui, c'est peut-être ce qui vous a permis de vous rencontrer. Mais qu'est-ce qui garde ensemble de cette façon ? Comment dire ? Une amitié aussi forte que la vôtre, ce n'est pas très commun.

- Je ne sais pas. Mais... comment sais-tu si c'est une amitié aussi forte, comme tu dis ?

- Je sais pas." Matt posa son verre sur la table. "Ce doit être la manière dont vous agissez l'un avec l'autre. C'est... comme si vous n'aviez pas besoin de mots pour savoir ce que l'autre pense ou ressent. Comme si tout était dans vos yeux. Je suis sûre que quand l'un de vous veut cacher quelque chose à l'autre, il évite simplement son regard. N'ai-je pas raison ?

- Peut-être."

Blair se leva et prit les verres vides. Il proposa à Matt de choisir un livre pour s'occuper et se rendit dans la cuisine. Ce n'était pas qu'il se sentait mal à l'aise avec ce qu'il éprouvait ou le fait que Matt avait raison. C'était juste qu'il ne s'était jamais rendu compte que l'amitié entre Jim et lui était aussi évidente vue de l'extérieur. Bien sûr, Matt était très perspicace ; elle était loin d'être stupide. Et quand Jim et lui l'avaient interrogée la veille, il avait senti que Matt et lui avaient quelque chose en commun. La manière dont elle avait parlé de son enfance était exactement identique à celle dont lui-même voyait sa propre enfance. Mais si c'était si évident, cela signifiait-il que c'était si important à ses yeux ?

Il retourna au salon. Matt avait un livre à la main. Il ne lui fallut pas plus d'une seconde pour reconnaître l'un de ses livres sur les civilisations précolombiennes.

"Je peux vous emprunter ce livre ? questionna Matt.

- Bien sûr. Mais c'est peut-être un peu compliqué pour toi, tu sais.

- Vous étiez anthropologue, non ? Si j'ai du mal à comprendre quelque chose, je vous demanderai.

- Pas de problème." Blair sourit et s'intalla dans le salon.

Matt s'installa sur la canapé et ouvrit le livre. Ce qu'elle faisait n'était pas stupide, au contraire. Elle s'était trompée.

"Matt," l'appela Blair."Ta mère n'a pas vraiment l'air de te manquer tant que ça.

- Si, bien sûr qu'elle me manque, répondit l'adolescente avec sincérité. Mais mon père m'a appris à ne pas pleurer, à cacher ce que je ressens. Etre sensible c'est être faible.

- C'est être humain... Tu pleurais quand on t'a trouvé. Et ne dis pas que tu avais une poussière dans l'oeil  !

- Vous n'étiez pas supposés me trouver. Et elle, elle n'était pas supposée mourir."

Matt sentit les larmes monter à ses yeux, et les essuya avec sa manche avant qu'elles ne coulent le long de ses joues.

"Est-ce que tu veux parler d'elle ? demanda Blair avec tact.

- Qu'est-ce que vous voulez que je dise ? - Le ton de sa voix donna à Blair l'impression qu'elle n'en avait pas envie, mais il proposa cependant :

- Comment elle était ?

- Comment elle était ?"

Blair confirma d'un mouvement de tête.

"Elle... était gentille et douce. Peut-être un peu trop protectrice mais ce doit être comme toutes les mères. Je comprends pourquoi elle avait peur. Comment réagiriez-vous, si vous appreniez que votre père peut agir de la sorte ?

- Je ne sais pas qui est mon père, répondit simplement Blair.

- Oh.... Je suis désolée.

- Ce n'est rien. Que veux-tu dire par de la sorte ?"

Matt se mordit les lèvres. A nouveau, elle n'avait pas menti à propos de son père. Que se passait-il donc ? Elle le savait très bien, à vrai dire : elle se sentait en sécurité . Elle n'était pas avec quelqu'un de grossier, méchant, violent, comme son père pouvait l'être. Elle savait qu'elle pouvait lui faire confiance. Mais Blair était flic, par conséquent elle ne pouvait pas être complètement honnête avec lui ; elle devait contrôler chacun de ses gestes et ses mots, mais elle pouvait faire confiance à l'homme derrière le flic.

" Ma mère a quitté mon père il y a quelques semaines et m'a emmenée avec elle, pour que je ne reste pas avec mon père. Il était violent. Mon père ne l'a pas supporté et a juré qu'on serait tués si on partait. Ma mère n'a pas écouté ses menaces, et il les a mises à exécution.

- Ton père a tué ta mère. Pourquoi ne t'a-t-il pas emmené avec lui ?

- Il n'a pas essayé de nous tuer. Il a payé quelqu'un pour le faire.

- Pourquoi le tueur t'a-t-il laissée ?

- Je ne sais pas. Il n'avait peut-être qu'une seule balle dans son chargeur."

Dans le bureau de Simon, Jim expliquait à son capitaine qu'il n'avait rien trouvé au parking où le meurtre avait eu lieu et demanda ce qu'étaient les nouvelles annoncées.

"Te souviens-tu de la balle qui a tuée Stevens ? demanda Simon.

- Oui.

- Ce sont de toutes nouvelles balles fabriquées en Asia pour le marché noir. Il y a justement un bateau en provenance d'Asie parmi les arrivées prévues. Nous avons de bonnes raisons de croire qu'il s'agit d'une cargaison de ces armes.

- Ok. Je vais annoncer la bonne nouvelle à Sandburg."

PARTIE 3 : SENTINELLE

Seize heures. Au loft. Quelqu'un frappa à la porte.

"Qui est-ce ? interrogea Blair.

- C'est Jim ! Ouvre la porte, s'il-te-plait !"

Une fois Jim entré dans le loft, Blair et lui parlèrent ensemble, trop bas pour que Matt puisse entrendre. Mais elle devina le sujet de la conversation.

"Il y a du nouveau à propos du traffic d'armes.

- Et à propos du meurtre aussi. Le père de Matt a payé quelqu'un pour tuer sa femme qui voulait divorcer ou un truc dans ce genre. Son père est quelqu'un de violent et a éduqué Matt d'une manière quasi-militaire : ne pleure pas, ignore tes sentiments...Sois un robot, en somme !

- D'où sa voix hier....La balle qui a tué Margaret Stevens est une nouvelle sorte de balle faites en Asie. Simon pense qu'un bateau qui arrive officieusement de là-bas ce soir a une cargaison d'armes.

- Ok. Je vais aller au port et voir si je peux découvrir quelque chose.

- Non, c'est trop dangereux. Tu restes ici.

- Jim, laisse-moi te rappeler que je suis flic aussi maintenant. Je sais faire mon boulot.

- Si c'est le bon bateau et qu'ils te trouvent au port, tu peux te faire tuer."

Désormais, Matt pouvait entendre ce qu'ils disaient. La discussion se transormait en dispute et les deux flics avaient haussé le ton.

"Toi aussi, je te signale" dit Blair à Jim.

- J'ai un petit avantage qui peut m'aider, si tu voies de quoi je parle  !

- Un avantage que tu sais à peine contrôler et qui peut te rendre encore plus vulnérable et te faire perdre conscience de ce qui t'entoure, Jim !

- Je ne peux pas te laisser y aller seul si on ne sait pas si c'est vraiment sans danger !

- Bien sûr que tu peux. J'ai déjà fait ce genre de choses plusieurs fois, et je n'étais pas flic. A plus tard !"

Blair avait pris son blouson et était sorti avant même que Jim ait pu ajouter un seul mot.

"Vous vous inquiétez beaucoup pour lui, hein ? demanda Matt qui lisait son livre sur le canapé.

- Ce ne sont pas tes affaires ! répondit Jim avec colère.

- Non. Non, c'est vrai. Mais vous venez juste d'agir comme un père, un frère aîné ou....un ami. Vrai ?

- C'est mon partenaire et mon ami. Mais cela ne te concerne pas."

"Et voilà, ferme ton coeur à double tour, ajoute trois cadenas et jette la clef." pensa Matt.

Jim se rendit dans la cuisine pour prendre une bière dans le réfrigérateur. Il voulait se concentrer sur l'enquête et ne pas changer de sujet. Il voulait que tout cela soit enfin terminé, que le meurtrier soit enfin arrêté. Quand il revint au salon, Matt était toujours plongé dans son bouquin. Il dit :

"Tout ce que je veux, c'est t'aider. Mais si toi tu ne m'aides pas un peu, je ne peux rien faire pour toi."

Matt leva la tête, le regarda et Jim remarqua alors à quel point son regard était expressif.

"Je sais, répondit-elle, mais je le fais, je vais perdre mon père.Je ne savais pas comment c'est - je veux dire, je pensais que je n'avais pas vraiment un père, il n'était presque jamais là. Mais Blair et moi avons discuté et il m'a dit à propos de lui et son père, et j'ai compris qu'au moins, moi, j'avais cette chance de savoir qui il est, et de le voir au moins de temps en temps."

Jim s'était assis en face d'elle, et l'écoutait avec attention. Ce n'était rien. Presque rien. Il l'écoutait, rien de plus. Mais pour Matt, cela signifiait plus. Elle sut qu'elle pouvait lui faire confiance, comme elle avait fait confiance à son ami.

"Je ne veux pas le perdre. Je l'aime.

- Je sais. Mais si tu aimes vraiment tes parents, tu dois me dire ce que tu sais."

Elle détourna le regard, tentant de ne pas laisser ses yeux pleurer.

"S'il-te-plait...."

"Mon père...." tenta-t-elle. Elle prit son inspiration et recommença :"Mon père vend des armes. Il crée et vend des armes au marché noir. Il s'appelle Andrew Stevens mais il travaille sous le nom de Lanch. Il a un collègue en Asie. Il s'appelle... Tai Tong-Li. C'est un chinois. J'en suis pas sure mais je crois que cet homme est dans la mafia, dans une sorte de triade.Il y a quelques semaines, ma mère a découvert tout ça, et a quitté mon père, en m'emmenant avec elle. On est devenu dangereux pour eux ; on pouvait aller tout raconter à la police. C'est pour cela qu'il a décidé de la tuer. En fait, il a dit à l'un de ses collègues de le faire mais je ne sais pas qui.

- Et toi ?

- Comme je l'ai dit à votre partenaire, je n'en sais rien du tout. Je pense que l'arme qu'il a utilisé faisait partie des prototypes d'essais de leurs nouvelles armes et n'avait qu'une seule balle.

- Cela expliquerait pourquoi nous n'avons pas pu reconnaître la balle...

- Quoi ? La Quatre-Vingt-Neuf ?" demanda Matt.

Jim se rappela avoir lu ce nombre sur la balle et confirma.

"J'ai vu cette balle au moins une centaine de fois au club de tir.

- Au club de tir ? Tu es allé dans un club de tir ? Lequel ?

- En Asie il y a deux mois. Mon père m'avait emmené pour m'apprendre à utiliser un flingue."

Matt se souvint de la scène au club. Son père lui avait tendu un pistolet.

"Matt" avait-il dit "Tu vas apprendre avec une toute nouvelle sorte de balle, encore au stade des mises au point. Tu dois savoir comment l'utiliser, et surtout, que tu devras peut-être t'en servir un jour, et tirer sur quelqu'un sans aucun remords. Compris ? Dans ce monde, ça marche comme ça. Parfois, dans notre business comme dans la vie, parfois, c'est tuer ou être tué."

Matt avait pris l'arme et avait obéi. Elle s'était tourné vers la cible et avait tiré.

"Tuer ou être tuer." répété Matt, en secouant lentement la tête, comme si elle était en train de réaliser à quel point c'était faux."C'est sa phrase favorite."

"Tuer ou être tué." répéta Jim à son tour."C'est n'importe quoi.

- Je sais. Je l'ai entendu mais..."

La sonnerie de téléphone l'interrompit. Jim se leva et répondit :

"Ellison.

- Jim, c'est Simon. Tu n'es pas au port ?

- Sandburg y est. Que se passe-t-il ?

- Quelqu'un a été tué là-bas.

- Quoi ? J'y vais tout de suite."

Jim raccrocha. Il n'aurait jamais dû laisser le Gamin se rendre au port seul. C'était bien trop dangereux. Et si c'était lui, la victime ? Jim trembla. Il sentit ses sens le lâcher. Sa peau le brûlait. Son nez était comme déréglé ; il reconnut les odeurs de l'eau, du sang, et d'autres choses, toutes mélangées. Sa langue devint folle. Il n'avait rien dans la bouche mais sentait les goûts de tout ce à quoi son cerveau pouvait penser, et le mélange avait un goût affreux. Il posa ses mains sur ses oreilles, il entendait trop de sons en même temps et son cerveau ne pouvait pas le gérer. Des gens parlaient partout :

"Mets ton écharpe, Benny, ou tu ne sortiras pas jouer."

"Ne me touche pas ! Laisse-moi partir ! C'est fini !"

"Soyez prudente en traversant la route, Madame."

Les moteurs des voitures, les klaxons, les battements de coeur - le sien, celui du Matt, celui du voisin, etc.- Il souffrait horriblement.

Sa vue aussi s'échappait de la réalité. Il ne voyait que des couleurs, mélangés, se déplaçant comme un vortex dans un brouillard bleu et mauve.

Il était en train de zoner.

Non. Non, il ne pouvait pas zoner maintenant !

Matt se leva et s'écria :

"He ! Vous allez bien ? Qu'est-ce que je fais ?"

Jim perçut les paroles de l'adolescente et parvint enfin à revenir à la réalité.

"Hein ? Tu restes ici ! dit-il.

-Quoi ? Si je restes ici seule, je peux me faire tuer !

- Prends ton blouson !

- Cool !"

Matt se dépêcha d'enfiler son blouson et ils partirent.

Au port, plusieurs policers dont Simon discutaient. Une ambulance était là. Le cadavre se trouvait sur le sol ; ce n'était pas Blair. Le regard de Jim en disait long au moment où il le réalisa, et Jim put lire dans ses yeux comme dans un livre ouvert.

"Simon." appela Jim, puis il remarqua que Blair n'était pas avec eux. "As-tu vu Sandburg ?"

"Pas encore. Tu es sûr qu'il est ici.

- Absolument. Qui est la victime ?

- Un jeune drogué qui a tué un autre jeune. Qu'est-ce que cette enfant fait ici ?

- Elle essaie de rester en vie, répondit Matt.

- Simon, je vais essayer de chercher quelque chose pour faire avancer notre enquête... et trouver Sandburg." Jim s'éloigna de quelques pas, puis se tourna vers Matt et ajouta : "Toi, tu restes ici."

Jim s'éloigna. Matt ne lui obéit pas et le suivit aussi discrètement que possible. Il marchait lentement quand soudain, comme s'il venait d'entendre quelque chose, il accéléra le pas et bifurqua dans une allée. Matt était toujours derrière lui. Cachée derrière un mur, elle put voir Jim et un autre homme, qu'elle reconnut comme étant Blair. Comment Jim avait-il pu savoir que Blair se trouvait là ? L'avait-il entendu ? Cela semblait incroyable. Un million de pensées traversèrent son esprit à cet instant, comme un flashback, un best of de tout ce qu'elle savait d'eux. Au parking Lincoln, au loft, à ce moment-là. La thèse de Blair Sandburg. Cette phrase qu'elle avait entendu à la TV : "Ma thèse, La Sentinelle, est une fraude." Maintenant, ils étaient partenaires. Elle pensa qu'elle avait enfin compris pourquoi, mais elle n'arrivait pas encore à le croire.

Elle décida de quitter sa cachette mais à peine eut-elle bougé que Jim se tourna vers elle :

"Mathilda." dit-il."Je t'avais dit de ne pas venir.

- Comment saviez-vous que j'étais ici ? demanda-t-elle.

- Je t'ai entendu.

- Vous avez appris quelque chose ? demanda-t-elle à Blair.

- Comme je viens de le dire à Jim, un bateau arrive d'Asie ce soir à huit heure et demi. Mais je ne connais pas le nom du bateau, et d'ailleurs je ne suis pas sûr que ce soit le bon.

- On va quand même essayer, enchaîna Jim, en posant une main sur l'épaule de Blair et en se dirigeant vers le port où Banks les attendait. Et on va prier que ce soit celui qu'on cherche."

Mais Blair n'était pas convaincu :

"On risque de perdre un temps précieux si je me trompe.

- Je sens que j'ai de la chance aujourd'hui, Grand Chef."

PARTIE 4 : HUIT HEURE ET DEMI

La nuit tombe tôt à Cascade en hiver. Il faisait déjà sombre quand, à huit heure, la voiture de Jim se gara près du port. De là, il était facile de voir le bateau approcher. Pas très loin, d'autres cars étaient garées. Personne n'aurait pu imaginer qu'il s'agissait de voitures de police. Chacun essayait de passer le temps. Certains jouaient aux cartes ; d'autres bavardaient, comme le feraient de jeunes gens qui veulent s'amuser. Dans d'autres voitures, le silence dominait. C'était le cas dans la voiture de Jim.

Jim avait l'esprit ailleurs et n'avait pas prononcé un mot depuis leur arrivée. Blair détestait le silence. En fait, c'était plus qu'il avait besoin d'éviter tout endroit où le silence était la seule chose qu'il pouvait écouter ; cela l'avait toujours mis mal à l'aise. Au contraire, Jim aimait le silence. Il pouvait entendre tout ce qu'il voulait, même ce qui se passait à près de deux kilomètres. Mais là, Blair voulait parler. Le fait est qu'il devait admettre qu'il y avait autre chose de particulier : il ne savait pas à quoi pensait Jim et ce dernier était en train d'éviter son regard. Finalement, il se décida :

"Eh, Jim, qu'est-ce qu'il y a ?

- Pardon ? répondit Jim, qui abandonna soudain ses parents pour le monde réel.

- Quelque chose t'ennuie ?

- Non, répondit Jim avec un sourire, j'étais juste en train de penser.

- J'ai vu, dit Blair en riant, c'est très bien ! A propos de quoi ? demanda-t-il plus sérieusement.

- Toi.

- Moi ?

- Oui.

- Et ?"

Un silence interrompit la conversation, comme un antagonisme parfait avec les derniers mots, qui avaient été prononcés presque sans prendre le temps de respirer. Jim soupira et répondit :

"J'ai discuté avec Matt.

- Moi aussi, l'interrompit Blair.

- Elle m'a parlé de nous et je ne savais pas que c'était si... évident. Je me suis souvenu du jour où s'est rencontrés.

- Ecoute-moi bien, espèce de néo-hippie de mes deux..., Blair imita Jim.

- Content que tu n'aies pas oublié, Grand Chef, dit Jim en riant.

- Tu sais, Jim, elle m'en a aussi parlé. Et pour être honnête, j'ai été assez gêné.

- Pourquoi ? Tu as laissé tomber ta vie juste pour me protéger, et je ne peux pas m'empêcher de...

- Allez, Jim. J'adore le boulot que je fais avec toi maintenant. Tu n'as pas à te sentir responsable. Je l'ai fait parce que je le voulais. Je suis ici parce que j'en ai envie. Je suis sincère."

Un bateau, le Pengma*, se dirigeait vers le port mais en était encore trop éloigné pour que quiconque puisse l'apercevoir. Un homme d'origine asiatique, âgé d'une quarantaine d'années, prit un téléphone et composa un numéro. Peu après, il entendit une voix répondre et dit :

"Monsieur Lanch, c'est Tai. Nous arrivons dans quelques minutes. Soyez prêts !"

Puis, il appela un jeune homme, lui aussi asiatique, et lui demanda de préparer la marchandise. Avec l'aide d'autres membres de l'équipage, le jeune homme transporta les boîtes de la cale au pont.

"Je suis ton Shaman et tu es une Sentinelle. Il y quelque chose qui nous unit, comme un lien. C'est plus fort que nous et on ne peut pas le contrôler.

- Cela n'a rien à voir avec le fait que je sois une Sentinelle, Blair.

- C'est comme cela que nous nous sommes rencontrés.

- Ce n'est qu'une part de ça, marmonna Jim presque sans écarter les lèvres.

- De... De quoi ?

- Matt a dit que je m'inquiétais pour toi comme -je cite ses mots - un père, un grand frère ou un ami le ferait.

- Tu l'es, Jim. Pour moi, tu représentes cela. Enfin, ce que je veux dire, c'est que.... On a toujours été plus que de simples partenaires. Tu le sais au moins aussi bien que moi.

- Je sais, Grand Chef. Nous sommes amis.

- Alors où est le problème ?

- J'ai failli te perdre à plusieurs reprises. A chaque fois que tu m'accompagnais pour m'aider si je venais à zoner, j'avais peur. Parce que si tu étais blessé, physiquement ou émotionnellement, ça aurait été ma responsabilité. Parce que même si je contrôle mieux mes sens, j'ai toujours besoin de toi pour cette raison... mais j'ai aussi besoin de toi en tant qu'ami.

Jim fit une pause, regarda Blair qui l'écoutait attentivement, puis reprit :

"J'ai zoné au loft quand Simon m'a appelé pour me dire que quelqu'un avait été tué ici. J'ai cru que c'était toi. Je n'ai pas eu peur parce que tu n'étais pas là pour me ramener à la réalité mais parce que j'avais besoin de savoir que ce n'était pas toi.

- C'est bien que tu en parles, Jim."

Le Central était presque vide. Simon Banks lisait son courrier, et en dépit de la fatigue, il essayait de rester concentré. C'était une têche ardue, d'autant plus qu'il n'aimait pas cela d'habitude. Matt était assise à un bureau, pianotant sur un clavier d'ordinateur, elle jouait aux échecs contre un lamentable joueur virtuel nommé Kasparov. Elle ne parvenait pas à oublier ce qu'elle pensait avoir deviné à propos des deux détectives.

"Vous saviez que Jim Ellison a des sens hyper-développés ? demanda-t-elle à Banks.

- Quoi ? s'écria le capitaine, surpris, ne sachant pas comment il était censé réagir.

- Il peut voir et entendre des choses que personne d'autre ne peut voir ou entendre.

- Vraiment ?

- Ne le saviez-vous pas ?

- D'où est-ce que tires cette idée ?

- Déduction." répondit-elle. Simon ne répondit pas et prit une nouvelle enveloppe."Laissez tomber." conclua Matt.

Il était maintenant huit heures et demie.

Le port était calme. Même trop calme. Un parfait silence régnait dans chaque voiture de police. Les parties de cartes étaient terminées. L'un des policiers, nerveux, continuait à mélanger les cartes encore et encore. Ils cessèrent leurs bavardages et tournèrent leur attention vers le port.

Andrew Lanch et deux de ses collègues se tenaient debouts, attendant que le bateau arrive. Enfin ! Il arriva et tout se passa très rapidement. Plusieurs personnes descendirent du bateau et serrèrent la main de Lanch et des deux autres hommes. Ils montèrent tous sur le pont. Tout à coup, tous les policiers sortirent de leurs voitures et arrêtèrent les traffiquants. Lanch tenta de s'échapper mais Jim attrapa son bras et, avec Blair, le mit sous contrôle, non sans difficulté.

"On fait une bonne équipe, n'est-ce pas, Grand Chef ?

- Bien sûr."

Des policiers ouvrirent les coffres qui se trouvaient déjà sur le point et ne purent retenir un cri de surprise. Ils étaient remplis d'armes, un véritable arsenal : pistolets, balles, armes à feu en tout genre.

"Le parfait attirail pour deux traffiquants d'armes comme Andrew Lanch et Tai Tong-Li." déclara Jim

Dans l'un des coffres, il découvrit un nombre incalculable de 89's.

"Dites-moi si je me trompe, Lanch, mais elles se vendent bien, celles-ci ?" demanda-t-il. L'homme ne répondit pas.

Blair ne pouvait supporter le père de Matt. Son comportement montrait un homme égoïste et prétentieux, trop strict pour laisser sa fille vivre son enfance. Andrew Lanch, ou Andrew Stevens, était plus grand que Jim. Malgré la nuit sombre, le jeune homme put voir qu'il était entièrement vêtu de noir, portait des chaussures noires, et avait des cheveux noirs sous un chapeau noir. Tout ce qu'il pouvait dire pour d'écrire l'homme était : "Il est l'incarnation du mal."

Puis il se tourna vers Tai Tong-Li. Cette homme avait une élégance certaine. Ses cheveux étaient aussi noirs, mais plus longs que ceux de Lanch. Ses yeux bleus brillaient presque. Il portait le même costume que son associé mais sous sa verte ouverte sa chemise était blanche.

Si Andrew était l'allégorie des ténèbres, lui était celle de l'élégance.

Tous furent emmenés et interrogés.

PARTIE 5 : EPILOGUE

Le lendemain, quand Jim se leva, Blair était déjà parti. Il trouva une note écrite par Blair sur la table, et apprit ains que le jeune homme avait quelque chose à faire et était parti de bonne heure,e t que Simon avait appelé pour leur annoncer que leur journée de travail ne commencerait qu'à onze heure, afin qu'ils puissent se reposer. Quand il arriva, il fut immédiatement convoqué par son capitaine.

"On m'a dit que tu voulais me parler, Simon ?

- Oui. Les cinq hommes qui travaillaient pour Tai Tong-Li et les deux hommes qui travaillaient pour Lanch ont fini par avouer. Tong-Li et Lanch n'ont rien voulu dire mais avec les résulats de l'autopsie, la marchandise et les autres témoignages,  on a de quoi prouver leur culpabilité.

- Que va-t-il arriver à la gosse ?

- Mathilda Stevens ?

- Oui.

- Elle va rester dans un orphelinat, je pense. Maintenant que c'est terminé, ils l'ont acceptée à nouveau.

- Mais elle ne mérite pas ça ! répliqua Jim.

- Ne t'inquiète pas, Jim, dit Blair qui venait d'entrer, accompagné de Matt. Je suis allé la chercher ce matin et on a discuté pendant une bonne heure. J'ai trouvé un endroit qui n'est pas un orphelinat et qu'elle aime. Ainsi, elle pourra étudier ce qu'elle souhaite et aller à l'Université. Quelqu'un doit venir la chercher d'un instant à l'autre. Elle n'aura pas à rester dans ce orphelinat très longtemps.

- Où va-t-elle aller alors ?" demanda Jim, curieux.

Blair s'approcha et lui murmura quelque chose à l'oreille. Jim éclata de rire.

"Es-tu sûr que c'est une bonne idée, Grand Chef ?

- Oui, elle est très enthousiaste.

- Et comme cela, je pourrais passer vous saluer de temps en temps."

Une femme ouvrit la porte et appela Matt : "Il faut y aller, Matt.

- J'arrive. Une minute." répondit Matt. Elle attendit que la porte soit fermée à nouveau pour se tourner vers Jim :

"Je vous promets que je ne dirais rien à propos du truc.

- Quel truc ?

- Ben.... Vous savez, le.... truc, tenta-t-elle de répondre, s'aidant de ses mains.

- Elle est au courant, Jim." annonça Banks.

"Elle sait quoi exactement ? demanda Jim qui commençait à s'impatienter.

- Que vous êtes une Sentinelle, avoua Matt.

- Comment ? C'est Blair qui... ?"

Jim ne savait pas ce qu'il ressentait. Il savait qu'elle comprenait mais il ne pouvait se retenir de lui en vouloir.

"Non, il n'a rien dit. Je vous ai vu les utiliser au port. Et vous étiez sur le point de... Comment appelez-vous cela ?

- Il a zoné, dit Blair.

- Voilà. Vous avez zoné quand vous étiez au téléphone. Je dois avouer que ça fait bizarre. "

Une nouvelle fois, quelqu'un ouvrit la porte. Cette fois, c'était un policier qui demandait à Simon de venir. Il salua et sortit.

Matt regarda Jim et acheva son explication :

"Et puis, comment auriez-vous pu me trouver au parking si vous n'en étiez pas une ? Vous m'avez vue et entendue, alors que de là où vous étiez, c'était impossible.

- Tu ne voudrais pas faire flic plutôt qu'anthrpologue ? proposa Jim avec un sourire.

- L'anthropoloie est un très beau métier, défendit Blair, au moins au moins que flic."

Matt sourit et déclara :

"Je dois y aller. A bientôt."

Elle serra la main de Jim, puis de Blair qui lui demanda de prendre soin d'elle, ce qu'elle promit. Elle attrapa son sac à dos au passage et sortit.

Il y eut un moment de silence dans la pièce, mais il n'avait rien de malsain. C'était un silence qui signifiait que cette enquête-ci était terminée, qu'il fallait prendre la vie comme elle venait jusqu'à ce la prochaine enquête .

"Si on allait déjeuner ? proposa Jim. Je meurs de faim.

- Très bonne idée ! Où va-t-on ?

- Je te laisse décider. Tu me le diras dans la voiture."

Dans l'ascensceur, Blair se tourna vers Jim et dit :

"Je suis heureux de t'avoir pour ami, Jim.

- Moi aussi, Grand Chef, moi aussi."

FIN

* pengma : Oui, oui, c'est un jeu de mot ;-)